"En tant qu’artiste visuel, il suffit souvent de quelques mots puissants pour clarifier et motiver la création."
La galerie Les filles du calvaire est heureuse de présenter l’exposition personnelle du photographe américain Todd Hido : The Black Mechanism. L’artiste revient à Paris avec un nouvel ensemble d’images puissantes, prises principalement aux États-Unis. Les paysages photographiés par l’artiste révèlent un monde désolé et sombre, un précipice dont on pressent qu’il peinera à s’extirper. Ce nouveau corpus de paysages est entremêlé de portraits aux expressions subtiles et inquiètes, suggérant elles aussi la noirceur ambiante.
« Pour le texte de mon livre Bright Black World, publié en 2018, Alexander Nemerov écrivait dans sa première phrase : « La fin envoie un avertissement préalable ». Il aurait pu s’arrêter là, car ces quelques mots m’ont contaminé, moi et mes images, de la meilleure façon qui soit. En tant qu’artiste visuel, il suffit souvent de quelques mots puissants pour clarifier et motiver la création. La plupart de mes nouvelles œuvres sont réalisées avec cette phrase qui résonne dans mon subconscient lorsque je regarde les espaces que je traverse. L’appareil (the black mechanism) recueille alors mes pensées, mes sentiments alors même que je témoigne aussi du monde dans lequel nous vivons. Dans mon dernier livre, j’explorais déjà l’idée d’un monde plus sombre dans lequel je nous voyais glisser. À mon grand désarroi, je ne vois toujours aucun sursis. »
L’ensemble des paysages présentés à la galerie sont le fruit de plusieurs voyages, qui ont été pour l’artiste l’occasion de prendre le pouls du pays. En plein hiver, Todd Hido profite des éléments pour peindre une œuvre de la dévastation. Son propre sentiment s’exprime ici, mais ce trouble pessimiste est aussi universel. En filigrane, il nous parle d’une époque de guerres, entre les hommes d’abord, mais aussi contre la Terre.
Son talent se manifeste également dans l’art du portrait. Il mélange ainsi personnages et lieux : la combinaison devient cinématographique. Purs et sans filtre, ses portraits semblent donner corps à l’observation faite plus haut. Pensifs et mélancoliques, ces personnages affichent une nostalgie et un sentiment de perte que beaucoup d’entre nous expérimentent intimement. Pourtant, dans chaque image, une lueur intérieure est capturée par l’appareil. Il subsiste toujours un rayon, même frêle, pour éclairer visages, forets, et étendues glaciales. On aimerait croire ici, qu’il s’agit d’espoir.